Vivre en temps de guerre

Seconde Guerre mondiale

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Les femmes résistantes dans les rues de Nantes


Marcelle Baron. Une femme résistante à Nantes

Sur les 64 rues nantaises dénommées en hommage à  la Résistance locale1, cinq honorent la mémoire des femmes (soit moins de huit pour cent) : depuis 1946, la rue Josette Bocq, et, depuis 2011, les rues dédiées à quatre couples de résistants nantais du quartier des Batignolles, avec les rues Claude et Simone Millot, rue Louis et Louise Le Paih, rue Auguste et Marie Chauvin, rue Marcel et Marie Michel

Depuis les années 70, la représentation et le rôle des femmes dans la Résistance sont mieux connus ; dans la mouvance féministe, les travaux des historiens sur ce sujet se sont effet multipliés2.

Leurs missions : cacher, héberger, nourrir, approvisionner mais aussi, la presse clandestine n’aurait pas pu fonctionner sans leur soutien actif : elles deviennent alors responsables de la diffusion, assuraient les tâche de secrétariat…

Pour connaitre ces actions de résistance, à Nantes et dans le département, nous disposons d’archives, de récits rédigés par des résistantes et des témoignages3.

Cécile Vast s’est intéressée au journal clandestin nantais « En captivité ». Parmi les six membres fondateurs du journal, elle relève trois femmes : Elisabeth P., Julia Martin et sa sœur Alberte Martin. Avec Alberte Martin, Elisabeth P. alors secrétaire sténodactylo de métier, partagent la frappe des journaux tandis que Julia Martin, institutrice, rédigera quelques articles du journal4.

Dans son ouvrage récemment publié, Louis Le Bail met aussi en exergue trois femmes au sujet desquelles il écrit : « Les femmes des Batignolles ont joué un grand rôle dans la Résistance : Renée Losq, Paule Vaillant, Marcelle Baron… ». Elles hébergent chez elles des membres des Francs-Tireurs et Partisans, distribuent des tracts et collent des affiches…5

Certaines sont aussi agents de renseignements ou de liaison : ainsi en était-il de Josette Bocq et de Simone Millot.

A Nantes, à la question, « quelle est la place des femmes dans la mémoire de la Résistance ? », on peut tenter de répondre que cette reconnaissance est toute relative; surtout, elle est tardive puisque sur les cinq dénominations, quatre datent seulement de 2011.


Voir la carte "La résistance dans les rues de Nantes"

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 1Les noms d’envergure nationale tels que Jean Moulin (nom de rue) et Lucie Aubrac (nom d'école ) sont absents de cette carte.

 2http://www.chrd.lyon.fr/chrd/sections/fr/pages_fantomes/fiches_thematiques/?aIndex=2
THALMAN Rita, “L’oubli des femmes dans l’historiographie de la Résistance », CLIO. Histoire, femmes et sociétés [En ligne], 1 | 1995, mis en ligne le 01 janvier 2005.   http://clio.revues.org/513?&id=513

VEILLON Dominique, « Femmes dans la Résistance intérieure (les) », Dictionnaire historique de la Résistance, sous la direction de François Marcot, Robert Laffont, 2006, p. 884-885.
Une bibliographie sur les femmes dans la Résistance est en ligne sur le site de la Fondation de la Résistance. http://www.fondationresistance.org/documents/dossier_them/Doc00043.pdf

 3Quelques récits : SESMAISON (de) Yves, Une Nantaise dans la Résistance Yolaine de Sesmaisons 1940-1945, Coiffard, 2003/Hervé-Fraud Juliette, Jo, notre frère. Instituteur, résistant, Nantes : Petit véhicule, (1995 ? ).

 4VAST Cécile, En Captivité. Etude d’un journal clandestin (24 novembre 1940-27 juillet 1941), Mémoire de maîtrise, sous la direction de François Marcot, Université de Franche-Comté, 1996, p. 10 / VAST Cécile, « En Captivité », in Dictionnaire historique de la Résistance, sous la direction de François Marcot, Robert Laffont, 2006, p. 715-716.

 5LE BAIL Louis, Saint-Jo et les Batignolles. Histoires d’un quartier nantais, Amicale laïque Porterie/Batignolles-Retrouvailles/Commune libre Saint-Joseph-de-Porterie, 2012, p. 211.

Coups de coeur des bibliothécaires de Nantes #3

Nadine travaille à la bibliothèque municipale de Nantes, où l'on peut emprunter ce DVD.

 

La mer à l’aube -  film de Volker Schlöndorff, 2011, 90 mn

 

Avec : Léo Paul Salmain (Guy Môquet), Marc Barbé (Jean-Pierre Timbaud), Ulrich Matthes (Ernst Jünger), André Jung, Jean-Pierre Darroussin.

 

 

« J'ai entendu parler de cette histoire, il y a 50 ans, alors que je passais mon bac en Bretagne. Au cours des années, il m'est devenu d'autant plus urgent d'en parler qu'à ma connaissance aucun réalisateur allemand n'a jamais fait un film sur l''Occupation. J'ai voulu proposer une reconstitution en mosaïque, un chant polyphonique, sans parti pris, à l'intention de tous ceux qui doutent du sens de l'Europe. » Volker Schlöndorff

 

Le 21 octobre 1941, trois militants des jeunesses communistes abattent un officier allemand dans le centre de Nantes. En représailles, Hitler exige aussitôt l'exécution de cent cinquante otages français. À Châteaubriant, en Loire-Atlantique, le sous-préfet Lecornu est chargé de désigner les otages qui seront fusillés au sein des prisonniers politiques internés au camp de Choisel. Parmi eux, le jeune Guy Môquet...

La Kommandantur, le camp, le bunker, le film retrace à trois niveaux les 33 heures qui séparent le meurtre de l’officier allemand de l’exécution des 48 otages.

Le scénario, écrit par Schlöndorff et Pierre-Louis Basse (auteur du livre Guy Môquet - Une enfance fusillée), est fondé sur des documents d'époque, mais il est aussi inspiré par le journal d'Ernst Jünger (l'officier chargé de noter le cours des événements), de même que par des écrits d’Heinrich Böll.

 

La Deuxième Guerre mondiale est au cœur des thèmes explorés par Volker Schlöndorff. La mer à l’aube n’a pas l’envergure du merveilleux film du même réalisateur Le tambour (palme d’or, Cannes 1979). Il a cependant été récompensé par le Fipa d’or de la meilleure interprétation masculine pour le jeune Léo Paul Salmain lors du dernier Festival international des programmes audiovisuels à Biarritz  et par le Silver Bird Prize » aux Seoul International Drama Awards 2012.

 

Des extraits et des informations complémentaires sur le site d'Arte à voir.

 

Coups de coeur des bibliothécaires de Nantes #2

Caroline travaille à la Bibliothèque municipale de Nantes. Elle nous conseille cette lecture pour comprendre la place des femmes dans la Résistance.

 

Laurence Thibault (dir.), Les femmes et la Résistance, AERI / La documentation Française, 2006, 175 p.

 

 

Ce premier numéro de la collection « Les cahiers de la résistance » s’attache à rendre compte de l’activité de résistance des femmes en France pendant l’occupation. Sont évoquées ici tout autant les femmes célèbres de la résistance (Lucie Aubrac, Germaine Tillion, Berty Albrecht) que les inconnues de toute condition sociale et de toutes les régions.

 

Leurs actions ont pris des formes diverses : agent de liaison, « boîte aux lettres », engagement dans l’Armée de la France libre mais aussi création de comité de femmes …

 

A travers témoignages, poèmes ou récits, cet ouvrage permet de rendre hommage à ces femmes qui, à la libération, retournèrent pour la plupart dans le plus total anonymat.

  

« Si les femmes ont été nombreuses à lutter aux cotés des hommes, elles se sont souvent livrées à des activités qui n’ont pas toujours laissé de traces, parce qu’elles s’inscrivaient dans le prolongement de leurs attributions habituelles […] Cependant, la condition propre des femmes et leur place dans la société donnent à leur engagement des aspects originaux […] ; le rôle des femmes sera essentiel lorsque la Résistance sera mieux structurée. »

 

 

 

Regards sur la guerre à Saint-Nazaire et à Châtellerault

Deux lectures proposées par Nicolas Jacob du Centre des archives de l'armement et du personnel civil de Châtellerault :

 

BRAUER, Luc. Les chars de la résistance, L’étonnante aventure d’un escadron FFI blindé sur la poche de Saint-Nazaire. Le Pouliguen, chez l’auteur, 2007

 

 

L’ouvrage de Luc Brauer « Les chars de la résistance » retrace avec de nombreuses illustrations de matériels la constitution d’une unité FFI fin 1944 à partir des chars allemands récupérés après la bataille de Normandie. Si de nombreux engins auront été réutilisés par les FFI dans toute la France au fur et à mesure du retrait de la Wehrmacht, il s’agit d’un cas notable d’unité constituée qui livrera des combats contre les troupes laissées retranchées sur les arrières des armées alliées dans la poche de Saint-Nazaire.

 

Cet ouvrage renvoie au caractère original de l’initiative des combattants et au fait insolite de voir les terribles panzers du Reich sous nos couleurs et qui finiront par être fêtés par les populations. Ces blindés seront ensuite englobés dans le 6ème Régiment de cuirassiers puis dispersés après guerre vers l’export ou au sein des collections, notamment du musée de Saumur.

 

Notons que le Centre des Archives de l’Armement et du Personnels Civils de Châtellerault détient un certain nombre de documents dans ses fonds relatifs aux engins allemands qui ont pu faire l’objet d’évaluations et d’essais dans l’immédiat après guerre.

 

 

ALBERT, Marie-Claude. Châtellerault sous l’occupation. La Crêche, Geste éditions, 2005.

 

 

L’ouvrage de Marie-Claude ALBERT sur Châtellerault sous l’occupation situe certes son propos hors de la Loire Atlantique, mais tout de même dans le grand ouest, et en zone occupée. La ville de Châtellerault, siège d’une des trois manufactures d’armes du pays, est en proie comme toutes les villes aux exigences de l’occupant, à la disette, à l’application des lois raciales. Marie-Claude ALBERT, au travers des archives et de témoignages, nous fait revivre l’humble quotidien, mais au travers duquel toujours transparaissent les enjeux politiques tant de la révolution nationale que de la répression.

 

S’appuyant sur des documents qui prouvent toute la dureté de l’époque, l’auteur explore toutes les thématiques, politique locale, vie quotidienne, réseaux de résistance, spoliations, déportations, en mettant des lieux précis et des noms sur les évènements. Le résultat en est que présentés sans emphase et terriblement concrets, les faits n’en sont que plus émouvants et souvent terrifiants.

 

Marie-Claude ALBERT a puisé une partie de ses sources dans les fonds du SHD/CAAPC à Châtellerault.

 

Occupation à tous les étages

Colette Vivier. – La Maison des Quatre-Vents. – Casterman, 2012, 237 p.
[Le texte présenté dans cette édition a été revu et corrigé en 1991 par André Duval, le fils de l’auteure. Colette Vivier est une des grandes figures de la littérature jeunesse du XXème siècle. Dans ses romans jeunesse réalistes, elle livre la vie quotidienne dans un langage du quotidien et donne la parole à l’enfant. Un style qui préfigure d’autres ouvrages jeunesse tel Le Petit Nicolas de René Goscinny et Sempé].

Ecrit juste après-guerre en 1945, par Colette Vivier, femme de lettres et résistante *, ce livre sera le premier roman jeunesse à évoquer la vie quotidienne des français pendant l’occupation. Il le fait de manière originale, par le biais des habitants d’un immeuble parisien, situé au 24 rue des Quatre-Vents, entre Noël 1943 et la libération de la ville en août 1944.
A chaque étage se trouve ainsi croqué la vie d’un ou plusieurs personnages symboliques de la période et qui permettent d’en découvrir ses particularités : Madame Sellier dont le mari est prisonnier depuis 1940, et ses enfants ; M. et Mme Moscot, en fait Moscowitz, et leur fils, juifs polonais chassés de Lyon ; M. et Mme Gourre et leur deux fils, famille largement favorables aux allemands ; la concierge dont le fils a rejoint la France Libre ; la petite Solange qui espère fébrilement des nouvelles de son grand-frère entré dans la Résistance, …

Ainsi, ils nous font découvrir la BBC, le rationnement et la collaboration, la délation et les actes de résistance, les juifs et les prisonniers, les alertes, la peur et enfin… l’espoir d’une libération.

Fil conducteur de L’histoire, Michel Sellier, âgé de douze ans, souhaite agir pour venger son père prisonnier. C’est à sa hauteur et à son rythme qu’on avance dans le roman, aux hasards de ses activités et de ses rencontres.

A partir de 10 ans.

*réseau de résistance du musée de l’homme

Extraits :

"Des Allemands défilaient sur la chaussée, en poussant leur chants noirs, avec une sportive lenteur." p. 44

"Il se rattrapa en dévorant avidement son assiettée de topinambours, tout en écoutant Norette qui racontait les évènements de la matinée. Les bombes étaient tombées sur la banlieue, la veille au soir ; la boulangère avait une cousine qui habitait de ce côté-là, et elle avait eu bien peur pour elle." p. 70

" - Et alors ? Tiens, avec tous ces allemands qui défilent chez eux, est-ce qu’on sait ce qui peut se passer ? Ils peuvent nous découvrir mes parents et moi, me faire arrêter…

Michel écarquilla les yeux.

-Toi ? pourquoi ?

- Parce que je que je suis juif, dit Georges amèrement, parce qu’il parait que c’est défendu d’être juif ! Et pourtant, reprit-il avec violence, est-ce que je n’ai pas des bras et des jambes comme les autres ? Est-ce que je ne vais pas à l’école, comme toi ? Est-ce que je ne travaille pas bien ? " p.74